Les camps de concentration nazis peuvent être définis comme des « institutions totales » monosexuées. Tout comme dans les couvents, casernes ou prisons, les « reclus » y vivent coupés du monde extérieur ; leur quotidien est soumis à une discipline stricte et réglée par l’institution formulant toute une série d’interdits, dont celui des relations sexuelles[1]. Cependant, comme le montrent les travaux du sociologue Erving Goffman sur ce type d’institutions[2], les internés parviennent à y mettre en œuvre des stratégies d’« adaptation secondaire », c’est-à-dire « des pratiques qui, sans provoquer directement le personnel, permettent aux reclus d’obtenir des satisfactions interdites[3]». Parmi ces dernières figurent les relations sexuelles. Or, bien que de nombreux témoignages mentionnent la vie sexuelle en camps, rares sont les rescapés qui s’attardent sur leur expérience. Les témoignages les plus riches en la matière, ceux auxquels nous allons faire appel par la suite, ont pour point commun d’avoir été rédigés immédiatement après la guerre, c’est-à-dire à un moment où la mémoire collective consensuelle des camps de concentration ne s’était pas encore sédimentée[4]. On y observe que l’organisation de la sexualité comme marché se rapproche de celle que les sociologues ont mise en lumière pour les milieux carcéraux contemporains. Ceci s’explique en partie par la genèse du système concentrationnaire : dès la création des camps en 1933, la population était composée d’opposants au régime hitlérien et de prisonniers de droit commun[5].
Les recherches menées par des sociologues de la prison montrent en premier lieu que le rapport à la sexualité en milieu carcéral varie selon le genre[6]. D’un côté, les femmes créeraient des couples au sein desquels les plus « masculines » joueraient le rôle de maris et de protecteur (reproduisant ainsi les principes d’une société patriarcale dans laquelle les femmes sont dépendantes de leur père puis de leur mari[7]). De l’autre côté, les hommes élaboreraient quant à eux un « système prédateur », caractérisé par une compétition permanente entre pairs dont l’enjeu serait la production et la consolidation d’une identité masculine ainsi que la préservation d’une image de soi respectable[8]. Par conséquent, ne pas être assimilé à un homosexuel constitue un enjeu important de ce système fermé et hétérosexiste au sein duquel les pratiques sexuelles se déclinent principalement sous la forme de la prostitution, du viol, et d’une homosexualité dite de situation.
Ceci nous conduit à mettre en évidence une seconde variable : l’orientation sexuelle. Les recherches menées en milieu carcéral montrent que les discours des prisonniers sur la sexualité cherchent à établir un compromis acceptable pour eux entre une injonction sociale à l’hétérosexualité et un contexte environnemental où seules des relations homosexuelles sont possibles. Les détenus élaborent un « discours rationnalisant l’homosexualité comme étant la solution à l’impossibilité d’établir des relations affectives hétérosexuelles[9]. » Ce phénomène participe de l’adaptation secondaire à l’institution totale telle que décrite par Goffman. Ce dernier note que « la plupart des institutions totalitaires ne se contentent pas de séparer les sexes pendant la nuit, elles n’admettent comme pensionnaires que des hommes ou des femmes. On a alors toutes chances de trouver dans les grandes institutions, ce que beaucoup d’observateurs qualifient de penchants homosexuels, si ce n’est de conduites homosexuelles[10]. »
Afin de mieux saisir les enjeux soulevés par l’homosexualité en camp de concentration, nous examinerons tout d’abord l’attitude de l’institution concentrationnaire face à l’homosexualité en tant que pratique, puis l’attitude des internés face à leurs camarades étiquetés en tant qu’« homosexuels ». Dans un second temps, nous nous intéresserons plus concrètement à la manière dont des relations affectives et sexuelles sont évoquées dans les témoignages de survivants des camps. Ceci nous permettra in fine de mieux éclairer certaines distinctions entre sexe et genre. Le premier terme renvoie aux déterminismes biologiques du masculin et du féminin tandis que le second cherche à les dépasser en s’attachant à la construction sociale des rôles masculins et féminins. Ainsi, en portant conjointement notre attention sur l’homosexualité (en tant que pratique) et sur les homosexuel.le.s (en tant que catégorie) nous chercherons à saisir comment le genre constitue une catégorie d’analyse pertinente pour comprendre les institutions recluses monosexuées[11].
Les homosexuel.le.s dans les camps de concentration
Les camps de concentration sont des institutions rigoureusement non-mixtes et la sexualité y est rigoureusement proscrite[12]. Selon le règlement intérieur du camp de femmes de Ravensbrück, « les rapprochements intentionnellement lesbiens, les “cochonneries” lesbiennes, le non-signalement de tels actes[13] » sont punis. De même dans les camps d’hommes, le règlement intérieur impose de « signaler immédiatement […] les infractions au §175. Qui omet de le faire sera puni de la même façon que le coupable[14]. » Dans les camps de femmes, le règlement se réfère au lesbianisme en tant que pratique tandis que dans les camps d’hommes il est fait référence à l’article 175 du code pénal allemand (en vigueur depuis 1871, mais aggravé à partir de 1935) qui condamne à une peine de prison les relations sexuelles entre hommes[15]. Dans un cas comme dans l’autre, la sanction est laissée à la discrétion de la S.S. (châtiments physiques, commando punitif ou prison du camp pour une durée déterminée[16]).
Les sanctions concernent tous les internés, quelle que soit leur orientation sexuelle présumée. Celle-ci est pour partie affichée sur la tenue des concentrationnaires par des triangles de couleur, selon un système de classement établi en 1937 et qui distingue une dizaine de catégories principales d’internés[17]. Les « homosexuels » masculins sont ainsi affublés d’un triangle rose[18]. Ce stigmate, tout comme les représentations communes associées à l’homosexualité, font des « triangle rose » des représentants d’une masculinité subalterne. Ils sont tenus à l’écart des autres internés, de jour comme de nuit. En journée, ils sont assignés aux commandos de travail disciplinaires les plus sévères (briqueterie, carrière, argilière et autres commandos de travail connus pour leur taux de mortalité élevée). La nuit, ils sont regroupés dans des chambrées distinctes afin d’éviter tout risque de « contagion[19] ». En vertu des mesures d’isolement, les triangles roses constituaient donc un groupe social marginalisé. De plus, les contacts avec les membres des autres groupes (droits communs, politiques, juifs, tsiganes, asociaux, etc.) restaient limités pour plusieurs raisons. Tout d’abord à cause de la suspicion et de l’opprobre qu’ils pouvaient susciter, ensuite en raison des sentiments ambivalents qu’ils étaient susceptibles d’éveiller, rappelant aux autres internés la misère sexuelle qui régnait dans les camps de concentration[20].
La sexualité d’après les témoignages de femmes survivantes des camps
Les témoignages des survivantes des camps relatifs à la sexualité se distinguent de manière générale de ceux des hommes en ce qu’ils ne mettent pas en avant un registre de vocabulaire invoquant le pulsionnel, le biologique ou les limitations sexuelles engendrée par l’univers concentrationnaire. Peut-être s’agit-il d’une plus grande pudeur ou d’une préoccupation secondaire ? Peut-être cela est-il aussi à mettre en lien avec la manière dont la mémoire des camps a été construite : principalement à travers la parole de déportées politiques, laissant ainsi de côté celle des détenues dites « asociales » et des détenues de droit commun.
Lorsque l’amour et la sexualité apparaissent dans des témoignages à la première personne c’est en effet avec une certaine pudeur. Par exemple, Margareta Glas-Larsson[21], qui était, tout comme son mari, internée à Auschwitz, fait part de la relation qu’elle a entretenue avec la doyenne du camp, Aurelia Reichert-Wald, alias Orli, de la façon suivante :
« L’instinct de survie est un instinct extraordinairement fort. Au camp c’était l’instinct le plus fort. Et c’était lié à la nourriture. Et il y avait aussi un besoin énorme de tendresse d’un homme ou d’une femme, peu importe. Et Orli était mon grand amour. Et cela ne me gêne pas de le dire… Si l’on pense en psychologue, on comprendra. C’était affreux. Nous manquions de chaleur, de chaleur humaine et de l’affection dont on avait l’habitude depuis l’enfance. Et plus tard du mari[22]. […] Une nuit j’ai demandé à Orli si je pouvais rester chez elle. Et je me suis couchée à ses côtés. […] Et durant cette nuit-là, le ciel était tellement rouge, je ne sais pas si c’était un feu, si les S.S. avaient allumé le transport des Hongrois ou s’ils brûlaient des enfants juifs ou bien encore si les Sonderkommandos brûlaient tellement d’êtres humains. Malgré cela, je n’étais pas malheureuse, au contraire. Cette nuit-là, j’étais affreusement heureuse, parce que je pouvais être auprès d’Orli[23]. »
Margareta Glas-Larsson précise dans la suite de son témoignage que c’est en premier lieu son amour pour Orli qui lui a permis de survivre à Auschwitz[24]. Il en va de même de Micheline Maurel, résistante française arrêtée en 1943 et déportée à Neubrandenburg, annexe de Ravensbrück. Dans Un camp très ordinaire, elle fait part de sa rencontre avec Kviéta, une danseuse tchèque :
« Un autre dimanche, le bloc tchèque a donné une petite fête. Kviéta dansait sans musique sur un poème patriotique que récitait une de ses sœurs. C’était très émouvant. Après la représentation, l’autre sœur m’a dit :
– Vous savez qu’elle n’a dansé que pour vous ?
Je m’en rendais compte un peu, et j’en étais aussi bouleversée que je pouvais l’être à l’époque. Jadis, à l’âge de Kviéta, j’avais aimé une institutrice. Mais Kviéta pouvait bien m’aimer si elle voulait. Je tâcherais de ne pas la décevoir. Je lui donnerais de mon mieux toute l’affection que je pourrais. Toute la joie. Cette affection paraissait lui être aussi précieuse que le pain. Un soir, tandis qu’elle me raccompagnait au bloc 3, elle me saisit le bras brusquement pour me donner un baiser. Je l’ai embrassée aussi. Alors elle a semblé rayonner de joie et s’est sauvée en bondissant[25]. »
Qu’il s’agisse de Micheline Maurel ou de Margareta Glas-Larsson, le registre de vocabulaire employé laisse une grande place à l’émotionnel et au sensuel. Il se distingue de celui usité dans les témoignages lorsqu’il est fait référence aux internées désignées comme lesbiennes (généralement rangées dans les catégories des droits communs ou des « asociales »). Dans Les Françaises à Ravensbrück, ouvrage publié par l’amicale de Ravensbrück et l’association des déportées et internées de la résistance (ADIR), les auteures attirent notre attention sur les lesbiennes comme suit
« Dans le bloc de punition sont enfermées beaucoup d’Allemandes, des Allemandes qui ont des mœurs spéciales. On enferme deux personnes qui sont “mariées ensemble“ dans ce bloc et ainsi la vie continue de plus belle. Seul le Julot (la femme qui a le rôle de l’homme) a le droit de parler. […] La Blockowa [la doyenne d’une baraque ou Block], d’ailleurs, est une lesbienne[26]. »
Le Verfügbar aux enfers, opérette rédigée clandestinement par Germaine Tillion en octobre 1944 durant son internement à Ravensbrück, permet de mieux saisir les représentations de l’homosexualité féminine en camp de concentration[27]. Cette opérette en trois actes compte parmi les très rares œuvres théâtrales réalisées et mises en scène en camp. Inspirée d’Orphée aux enfers de Jacques Offenbach, elle met en scène la vie quotidienne d’une espèce vivante particulière, la Verfügbar – qui désigne les internées « disponibles » pour la réalisation des travaux forcés dans les commandos du camp – à travers le regard que porte sur elles un naturaliste, personnage principal de la pièce. Ce dernier cherche, à l’instar d’un éthologue, à comprendre comment cette espèce parvient à survivre dans un environnement des plus hostiles.
Parmi les autres espèces qui évoluent dans ce microcosme, figurent les « Julots », sur lesquels le naturaliste s’attarde à plusieurs reprises. Étymologiquement, ce terme désigne un « pot de chambre », il a ensuite été repris dans l’argot français pour désigner un mari ou un amant, puis par extension un souteneur. Selon Germaine Tillion, les Julots désignent des femmes ouvertement lesbiennes et appartenant à la catégorie des « asociales » (les triangles noirs). Dans les didascalies initiales de l’opérette, l’auteure précise que les Julots sont « gras, chics, aux cheveux plaqués, ceintures très serrées, poitrines arrogantes[28] ». Ils s’opposent à la masse des concentrationnaires qui souffrait de malnutrition et survivait dans des conditions matérielles désastreuses. De plus, ils sont toujours masculinisés à travers les termes d’adresse. Dès la première scène du premier acte, le naturaliste les appelle « messieurs ». Et ces derniers parlent d’eux au masculin comme, lorsqu’en chœur, ils chantonnent :
« Regardez comme nous sommes chics, comme nous sommes gras, comme nous sommes beaux hola ho. – Nous sommes les champions du vol, de la combine, et du culot. – Le regard hardi, les ch’veux plaqués, le verbe haut. – C’est nous qui sommes les julots[29]. »
Tillion confirme ainsi ce que nous savions déjà par le biais de l’ouvrage Des Françaises à Ravensbrück, à savoir que les Julots se rapprochent des droits communs (dont ils maîtrisent les usages). Décrits comme au masculins comme étant hautains et hardis, ils évoluent en marge des concentrationnaires ordinaires (des Verfügbar) et c’est une des raisons pour lesquelles ils sont tantôt redoutés, tantôt enviés.
Les témoignages cités plus haut permettent d’observer deux lectures différentielles des relations affectives entre femmes dans l’univers concentrationnaire : la première met en avant des relations amoureuses apparemment dépourvues de sexualité tandis que la seconde, teintée de lesbophobie, insiste sur une sexualité « contre nature ». Une première explication à ce décalage pourrait résider dans l’incroyable mixité sociale du système concentrationnaire qui faisait se côtoyer riches et pauvres, résistant.e.s et criminel.le.s comme l’a souligné Bruno Bettelheim[30]. Ainsi, les femmes résistantes, du fait de leur socialisation politique, prolongeaient à l’intérieur des barbelés des valeurs émancipatrices défendues à l’extérieur. Les « asociales » et détenues de droit commun, en revanche – moins conscientisées et détentrices d’une subjectivité distincte quant aux rapports hommes/femmes – reproduisaient des modes de protection se rapprochant des schèmes connus de l’extérieur afin de lutter contre l’adversité et la violence du système concentrationnaire.
Un second type d’explication peut-être rapproché des analyses conduites par des sociologues interactionnistes sur les rôles endossés par les femmes en prison. On distingue les « femmes » (ou mommy) des butch ou (daddy[31]) ; ces derniers étant en charge de protéger les premières car « la prison ne prive pas les femmes et les hommes des mêmes choses. En prison, les femmes ne sont pas privées d’autonomie parce que […] elles n’ont jamais été autonomes ; elles ont toujours vécu sous la protection d’un homme – père, mari ou amant – à l’autorité duquel elles sont soumises[32]. » Parallèlement, John Gagnon et William Simon ont montré qu’en milieu carcéral, les conduites homosexuelles ne s’expriment pas de la même manière selon le genre car « les femmes sont socialisées dans le langage de l’amour avant celui du sexe, alors que les hommes sont socialisés dans le langage du sexe avant celui de l’amour[33]. »
Les deux types de distinctions que nous avons désormais établies (la première relative à la protection ; la seconde fondée sur la socialisation ) vont être explorées plus avant dans la partie qui suit, dédiée à la sexualité dans les camps de concentration pour hommes.
La sexualité d’après les témoignages d’hommes survivants des camps
Selon Hermann Langbein, un résistant communiste autrichien interné à Auschwitz, la sexualité masculine en camp relève avant tout du registre de la violence causée par les besoins sexuels des internés[34]. Les travaux sociologiques sur les lieux de détention masculine établissent en effet que les prisonniers ont tendance à improviser un système de relations homosexuelles prédatrices[35].
Qu’il s’agisse de Primo Levi, Elie Wiesel ou Eugen Kogon, nombreux sont les témoignages de survivants qui s’accordent à dire que les internés détenteurs de fonction usaient de leur statut pour avoir des relations sexuelles avec de jeunes prisonniers, généralement polonais ou juifs, nommés Puppenjunge, Pipels ou encore « jeunots[36] ». Le statut de « protégé » que ces derniers acquièrent fait d’eux des êtres à la fois privilégiés et jalousés des autres détenus. Toutefois, ce statut est éminemment précaire car s’ils révélaient les tendances/préférences sexuelles de leur compagnon de lit, ils causaient leur propre perte.
Le processus qui conduit à endosser le rôle de jeunot ne se fait cependant pas toujours sans heurts. Le sociologue Jörg Hutter a retrouvé dans les archives d’Auschwitz un procès-verbal d’interrogatoire conduit à la suite d’une dénonciation pour viol[37]. La dénonciation est le fait d’un détenu juif, Günther Weinberg, âgé de 21 ans. Le jeune dit avoir été abordé à la Buna, l’usine d’Auschwitz III, par Michael Unger, un interné allemand plus âgé que lui : il lui demanda de lui cirer ses chaussures et de lui nettoyer ses habits en échange d’une ration d’un demi-litre de soupe supplémentaire. Une fois le contrat rempli, Unger lui offrit en plus un pull-over. Puis il le conduisit dans une pièce retirée de l’usine. À la suite de quoi Weinberg déclare qu’Unger,
« me somma de baisser mon pantalon après m’avoir embrassé à plusieurs reprises. Une fois mon pantalon baissé, il introduit son membre dans mon anus, ce qui provoqua une très vive douleur. Nous avons ensuite quitté ensemble la pièce et il me dit que je ne devais en aucun cas parler à qui que ce soit de ce qui s’était passé[38]. »
Le caractère exceptionnel de ce document d’archives et le fait que le jeune Weiberg se soit dénoncé de lui-même posent question. Ne s’est-il pas rendu compte des conséquences qu’aurait cette dénonciation ou bien estimait-il que le viol dont il fut victime réclamait réparation, une réparation que seule la S.S. était en mesure de réaliser ? Toujours est-il que Weinberg a été condamné à une peine de vingt-cinq coups de bâton pour « avoir commis un acte contre-nature à l’intérieur du camp ». On ignore en revanche si Michael Unger a été puni. Si l’on se réfère aux témoignages des survivants, il aurait dû être condamné à la castration (comme cela était classiquement le cas en pareilles circonstances à Auschwitz d’après Hermann Langbein) ou bien à la peine de mort (si l’on suit les indications données par Eugen Kogon)[39].
Les viols masculins semblent avoir été monnaie courante en camp. Cette forme de domination est possible en vertu d’une distinction établie entre une masculinité « virile » qui se veut pénétrante et active et une masculinité « dominée », de facto passive et pénétrée incarnée par des « jeunots » tels Günther Weinberg.
Le témoignage d’Heinrich-Christian Meier permet de mieux comprendre les processus d’étiquetage, de conversion et de rationalisation des discours sur l’homosexualité en camp. Interné en tant que politique entre 1938 et 1945, Meier décrit son expérience au camp de Neuengamme dans un ouvrage intitulé So war es (C’était comme ça), publié en 1946[40]. Dans un chapitre intitulé « L’amour au camp », il décrit l’organisation du marché des relations affectives et sensuelles comme suit. Tout d’abord, il insiste sur la dimension biologique de la sexualité masculine, convoquant la notion de « besoin » pour expliquer le recours à des relations homosexuelles car :
« Il ne faut pas oublier que chacun devait bien s’en sortir avec ses besoins sexuels. Seuls quelques-uns restaient si purs et si naturels qu’ils pouvaient laisser leur système hormonal naturel faire son travail tout seul. Mais la plupart d’entre nous donnaient un coup de main au système, afin de pouvoir s’offrir le minimum de joie dont l’homme a besoin pour continuer de vivre[41]. »
Dans un second temps, Meier distingue deux types de relations en camp. Les premières relèvent d’un registre affectif et s’inscrivent dans la lignée des témoignages féminins de Margareta Glas-Larsson ou de Micheline Maurel cités plus haut ; les secondes font explicitement référence à une sexualité prédatrice. Meier rapporte comment les concentrationnaires forment des couples d’infortune qui leur permettent de survivre en camp :
« Mais plus important encore est ce besoin certain qu’à l’homme de pouvoir s’appuyer sur quelqu’un, ce besoin que chacun doit satisfaire d’une façon ou d’une autre. Il est faux d’affirmer d’un homme qu’il peut s’en sortir entièrement tout seul. Déjà, le voisin de lit est par définition d’une certaine façon plus proche que les autres camarades, et c’est ainsi que se créent des amitiés improbables. Au travail, il est réconfortant d’avoir un camarade sur lequel on peut compter. C’est encore mieux si celui-ci est un compagnon qui ne vous laisse pas en plan lorsque l’on est en détresse[42]. »
Ces affinités de circonstances sont ensuite qualifiées par Meier de « mariage de camaraderie », ce qui place implicitement l’accent sur l’assistance mutuelle, le respect, et la communauté de vie instaurée entre les concentrationnaires. L’auteur insiste à cet endroit sur la répartition des tâches domestiques à l’intérieur de la baraque, l’un des partenaires pourvoyant à certains besoins du couple, le second à d’autres :
« Jean et Max, nommons-les ainsi, sont l’un pour l’autre comme homme et femme. Le peu qu’ils possèdent, ils le partagent. L’un s’occupe de l’habillement de l’autre. Le peu de temps libre dont ils disposent, ils le passent ensemble. S’ils ont des intérêts intellectuels en commun, c’est d’autant mieux. Ils rendent visite ensemble. On les voit aller ensemble à la cantine ; ils partagent les paquets qu’on leur envoie. Ils règlent les questions financières ensemble et avec méthode. Si l’un des deux est attaqué, l’autre le défend. Il n’y a rien de plus naturel et d’humain que ce type de camaraderie[43]. »
Meier décrit bien une forme de concubinage qui fait écho à la division sexuée du travail domestique. Cependant, ce concubinage serait exempt de rapports sexuels car la sexualité se joue en dehors du couple. Dans la suite de son récit, Meier évoque ce qu’il qualifie de « tentations sexuelles ». Les jeunots dont il est question permettent à l’auteur de justifier et de rationnaliser l’homosexualité de circonstances. Selon lui, elle se justifie en raison d’une « pulsion naturelle » à aimer que partagent les hommes. Ladite pulsion se dirigerait naturellement vers les jeunots car leur physionomie les rapproche des femmes[44]. L’auteur déploie enfn une argumentation assez confuse sur l’opacité des règles de vie au sein des camps, affirmant qu’en fin de compte, les internés ne savaient pas s’ils étaient autorisés à « aimer » les jeunots. Le verbe choisi par l’auteur manifeste ici l’asymétrie des relations entre les hommes et les jeunots. À aucun moment, Meier ne questionne la position des jeunots qu’il présente uniquement comme des « tentateurs », justifiant ainsi la domination sexuelle exercée sur eux.
À la fin du chapitre consacré à l’« amour en camp de concentration », le propos de l’auteur se précise. Il décrit les relations homosexuelles asymétriques comme la norme à l’intérieur du camp. Selon lui :
« l’amour de même sexe devenait pour tout homme sain et normalement constitué partout tangible dans la rue principale du camp. De telles relations sont inévitables dans ces conditions. Dans la vie du camp elles jouent un rôle considérable. Avec le temps, même l’administration de la S.S. ne pouvait ignorer cette réalité. Elle devait tolérer l’existence de ces relations, pour ne pas dire les reconnaître[45]. »
Le témoignage de Meier offre un éclairage captivant sur la constitution et le fonctionnement du marché de la sexualité dans les camps de concentration d’hommes. Ainsi que l’explique l’auteur, ce marché se distingue des concubinages de circonstances qui ne sont pas fondés sur la sexualité et sont décrits comme plus égalitaires. Meier justifie l’existence d’un tel marché en raison de facteurs émotionnels, circonstanciels et « biologiques ». Cependant, la description que fait l’auteur de ce marché masque le fait qu’il fut réservé à une minorité statistique, constituée d’adolescents et jeunes hommes dans la fleur de l’âge et de détenus plus âgés détenteurs de fonctions (responsables de chambrée, de baraque, kapos[46], assignés à des tâches administratives, etc.) qui appartenaient à la « noblesse » de la société concentrationnaire. Ils représentaient entre 5 et 10 % de la population des internés et ils étaient les seuls à même de disposer des ressources physiques et stratégiques nécessaires pour pouvoir s’offrir des « jeunots ».
Conclusion : Redessiner les hiérarchies du masculin et du féminin
Les récits de témoins de l’univers concentrationnaire permettent de mettre en lumière une approche différentielle de l’homosexualité masculine et féminine. Aucun témoignage de femme ne mentionne une condamnation à la peine capitale en cas de dénonciation pour homosexualité. À l’inverse, Primo Levi ou Heinz Heger mettent en avant que, dans les camps d’hommes, être publiquement accusé d’homosexualité signifiait courir de graves sanctions, pouvant aller jusqu’à la peine capitale.
Ce sont donc deux visions distinctes de la sexualité en camp de concentration qui se dessinent. L’une se fonde sur les principes de domination et de subordination, nous éclairant sur la sexualité prédatrice qui s’exerçait principalement dans les camps d’hommes. L’autre vision, mise en lumière au moyen de témoignages d’ancien-ne-s déporté-e-s des camps de femmes, est fondée sur une conception complémentaire, si ce n’est égalitaire, des relations sociales. Dès lors, comme certains témoignages l’attestent, ce sont des relations émotionnelles, non dénuées d’une forme d’« amour », qui se tissent entre concentrationnaires, laissant la sexualité à la marge.
À un autre niveau, nous observons également que des hiérarchies de genre sont construites par les reclus. Elles s’inscrivent dans une vision traditionnelle de la masculinité. Les protégés, qu’ils soient hommes ou femmes, sont rappelés à leur condition de dominé(e), devant se soumettre et accepter des règles du jeu de relations précaires typiques des milieux extrêmes.
Enfin, les relations qui se dessinent au travers des témoignages rendent perceptible une distinction qui semble significative des relations de genre dans les milieux clos : la suprématie du masculin apparaît comme précaire, continuellement menacée et constamment susceptible d’être remise en question. Un tel constat prolonge les analyses que Germaine Tillion a conduites sur les sociétés méditerranéennes. Ces dernières sont caractérisées par une stricte séparation entre hommes et femmes et se fondent sur la suprématie des premiers sur les secondes[47]. Dans ce type de société, où tout s’organise en fonction de pôles opposés mais complémentaires, tous les êtres qui ne sont pas des hommes se trouvent donc en position de subordination. En admettant que les relations sociales puissent fonctionner d’une manière relativement semblable en camp, il devient plus aisé de comprendre la distinction établie par Hans-Christian Meier. D’après lui, les hommes se doivent de constituer une forme de couple pour survivre. Dans la mesure où la sexualité est absente de ces couples d’hommes, elle ne peut se jouer qu’en dehors. Or, dans les camps, les seuls êtres qui n’appartiennent pas à la classe des hommes sont les jeunots. Décrits comme se rapprochant des femmes, ils sont donc les seuls à même de ne pas déstabiliser l’ordre du genre, autrement dit à ne pas remettre en question la virilité de détenus masculins. Et dans la mesure où les femmes ont toujours été subordonnées aux hommes ce type de relation – ainsi que toutes les formes de violences qu’elles génèrent – n’ont pas cours dans les camps de femmes.
Contribution parue dans Enfermements III – Le genre enfermé. Hommes et femmes en milieux clos (XIIIe-XXe), Édité par Isabelle Heullant-Donat, Julie Claustre, Élisabeth Lusset, Falk Bretschneider aux Publications de la Sorbonne, 2017.
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[1] Cf. les contributions de C. Watzka sur les institutions totales (p. 25-56), ainsi que celles de K.-K. Patel et d’Elissa Mailänder sur les dynamiques du pouvoir dans les camps de concentration (p. 337-380) dans Falk Bretschneider, et al. (dir.), Personal und Insassen von ‘Totalen Institutionen’ – zwischen Konfrontation und Verflechtung, Leipzig, Leipziger Universitätsverlag, 2011.
[2] Erving Goffman, Asiles. Études sur la condition sociale des malades mentaux, Paris, Minuit, 1968 (édition américaine 1961).
[3] Goffman, op. cit., p. 98, 245-62.
[4] Pour une bibliographie détaillée, voir Régis Schlagdenhauffen, « Promotion de la prostitution et lutte contre l’homosexualité dans les camps de concentration nazis », Trajectoires, 1, 2007, p. 60-73.
[5] La bibliographie sur le système concentrationnaire nazi est monumentale, nous pouvons mentionner : Martin Broszat, « Nationalsozialistische Konzentrationalsager 1933-1945 », dans M. Broszat et al., Anatomie des SS-Staates, vol. 2, Olten/Fribourg, Walter, 1965 ; Olga Wormser-Migot, Le système concentrationnaire nazi (1933-1945), Paris, PUF, 1968 ; Annette Wieviorka, Déportation et génocide. Entre la mémoire et l’oubli, Paris, Plon, 1992 ainsi que Wolfgang Benz et Barbara Distel (dir.), Der Ort des Terrors. Geschichte der nationalsozialistischen Konzentrationslager (9. vol), Munich, C.H. Beck, 2005-2009.
[6] Sur la sexualité en prison, Arnaud Gaillard, Sexualité et prison. Désert affectif et désirs sous contrainte, Paris, Max Milo, 2008 ; Gwénola Ricordeau, Les détenus et leurs proches. Solidarités et sentiments à l’ombre des murs, Paris, Autrement, 2008. Sur les prisons de femmes : Myriam Joël, La sexualité en prison de femmes, thèse de doctorat, Université de Paris X-Nanterre, 2012.
[7] Rose Giallombardo, « Social Roles in a Prison for Women », Social Problems, 13/3, 1966, p. 282 : « The complementary role to the femme is the stud abroad or daddy who assumes the male role. »
[8] Daniel Welzer-Lang, Lilian Mathieu et Michaël Faure, Sexualités et violences en prison, ces abus qu’on dit sexuels en milieu carcéral, Observatoire International des Prisons, Lyon, éditions Aléas, 1996.
[9] Gwénola Ricordeau, « Enquêter sur l’homosexualité et les violences sexuelles en détention », Déviance et Société, 28/2, 2004, p. 233-253.
[10] Erving Goffman, Asiles, op. cit. 968, p. 332, n. 140, cité par Alain Giami dans « Les organisations institutionnelles de la sexualité », Handicap, Revue de sciences humaines et sociales, n°83, 1999, p. 3-29, p. 3.
[11] Sur la distinction entre sexe et genre, voir notamment Christine Guionnet et Erik Neveu, Féminins/masculins, Paris, Armand Collin, 2009 [2004] ainsi que « Sexe et genre » dans Laure Bereni, et al., Introduction aux Gender studies : Manuel des études sur le genre, Bruxelles, De Boeck, 2020, p. 15-36 tout comme Joan W. Scott, « Genre : une catégorie utile d’analyse historique », Les cahiers du GRIF, 37-38, 1988, p. 125-153.
[12] Tout du moins jusqu’en 1942, date d’établissement des premiers « bordels » dans les camps, voir Régis Schlagdenhauffen, « Promotion de la prostitution… », art. cité.
[13] Règlement intérieur du camp de concentration de Ravensbrück : Wer sich in lespischer (sic) Absicht anderen Häftli[n]gen nähert, wer lespische Schweinereien treibt oder nicht meldet, cité par Claudia Schoppmann, « Zur Situation lesbischer Frauen in den Konzentrationslager », dans Olaf Mußmann (dir.), Homosexuelle in Konzentrationslagern, Bad Münstereifel, Westkreuz Verlag, 2000, p. 143.
[14] Allgemeine Lagerordnung KL Sachsenhausen (1942), cité par Joachim Müller « Homosexuelle in den Konzentrationslagern Lichtenburg und Sachsenhausen – Werkstattberichte », dans O. Mußmann (dir.), Homosexuelle in Konzentrationslager, op. cit., p. 81.
[15] Sur la condamnation différentielle de l’homosexualité (masculine et féminine) tout comme sur l’histoire du paragraphe 175, voir Florence Tamagne, Histoire de l’homosexualité en Europe. Berlin, Londres, Paris :1919-1939, Paris, Seuil, 2000 (notamment p. 628-632).
[16] Voir Andreas Pretzel, « Ich wünsche meinem schlimmsten Feind nicht, dass er das durchmacht, was ich da durchgemacht habe : Vorfälle im Konzentrationslager Sachsenhausen vor Gericht », dans Andreas Pretzel et Gabriele Rosslach (dir.), Homosexuellenverfolgung in Berlin 1933-1945, Berlin, Rosa Winkel Verlag, 2000, p. 119-168 ainsi que Rüdiger Lautmann et al., « Der rosa Winkel in den nationalsozialistischen Konzentrationslagern, dans R. Lautmann (dir.), Seminar : Gesellschaft und Homosexualität, Francfort, Suhrkamp, 1977 p. 341 sq. sur les sanctions exercées en camp.
[17] Avant 1937 et dans certains camps, les « homosexuels » portaient une tenue sur laquelle était inscrit « 175 ».
[18] À l’inverse de l’Autriche dont les articles 129 et 130 du code pénal condamnaient aussi bien les relations homosexuelles entre hommes qu’entre femmes, en Allemagne seuls les hommes étaient poursuivis pour homosexualité. Certains témoignages rapportent que des « lesbiennes portaient le triangle noir des « asociales » dans les camps de femmes. (Cela n’a pas été confirmé par la recherche). Voir Régis Schlagdenhauffen, « Les lesbiennes sont-elles des victimes du nazisme ? Analyse d’une controverse mémorielle », Revues d’Allemagne et des Pays de langue allemande, vol. 42, n°4, p. 553-568.
[19] Florence Tamagne, « La déportation des homosexuels durant la Seconde Guerre mondiale », Revue d’éthique et de théologie morale, 239, 2006, p. 99.
[20] Hugo Burkhard, Tanz mal Jude! Von Dachau bis Shangai. Meine Erlebnisse in den Konzentrationslagern Dachau, Buchenwald, Getto Shangai 1933-1948, Nuremberg, Reichenbach, 1967, p. 71.
[21] Sur la vie de Margareta Glas-Larsson et une analyse sociologique de son expérience concentrationnaire, Gerhard Botz, Michael Pollak, Margareta Glas-Larsson, « Survivre dans un camp de concentration », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 41, n°1, 1982, p. 3-28.
[22] Ibid. p. 23
[23] Margareta Glas-Larsson, Ich will reden: Tragik und Banalität des Überlebens in Theresienstadt und Auschwitz, Vienne, Molden, 1981, p. 176 [traduit par nous].
[24] Ibid., p. 149. Cf. Kerstin Meier, « “Es war verpönt, aber das gab’s” – Die Darstellung weiblicher Homosexualität in Autobiographien von weiblilchen Überlebenden aus Ravensbrück und Auschwitz », dans Beiträge zur Geschichte der nationalsozialistischen Verfolgung in Norddeutschland, Brême, Themen, 1999, p. 22-33, p. 28.
[25] Micheline Maurel, Un camp très ordinaire, Paris, éd. de Minuit, 1957, p. 129.
[26] Les Françaises à Ravensbrück, Paris, Denoël, 1965, p. 174.
[27] Germaine Tillion, Le Verfügbar aux Enfers, Paris, Points, 2007.
[28] Germaine Tillion, Le Verfügbar aux Enfers, Paris, Points, 2007, p. 30.
[29] Ibid.
[30] Bruno Bettelheim, Survivre, Paris, Robert Laffont, 1979.
[31] Rose Giallombardo, « Social Roles » (1966), art. cité, p. 282 : « The femme or mommy is the inmate who plays the female role in a homosexual relationship. […] The complementary role to the femme is the stud broad [butch] or daddy who assumes the male role. »
[32] Howard Becker, Les ficelles du métier, Paris, La Découverte, 2002 [1998], p. 229.
[33] John Gagnon et William Simon, Sexual Conduct, Chicago, Aldine, 1973, p. 252.
[34] Hermann Langbein, Menschen in Auschwitz, Francfort, Ullstein, 1980, p. 453. Traduit en français par Denise Meunier sous le titre d’Hommes et femmes à Auschwitz, Paris , Tallandier, 2011.
[35] Helen Eigenberg, « Homosexuality in Male Prisons : Demonstrating the Need for a Social Constructionnist Approach », Criminal Justice Review, vol. 17, n° 2, 1992, p. 219-234 ; Alice M. Propper, Prison Homosexuality: Myths and Reality, Toronto, Lexington, 1981 ; Katherine Van Wormer, « Becoming Homosexual in Prison : A Socialization Process », Criminal Justice Review, vol. 9, n° 1, 1984, p. 22-27.
[36] En allemand, un Puppenjunge désigne une poupée de sexe masculin et par extension un jeune homme « faisant le trottoir » ; un Pipel ou Piepel (terme à l’étymologie incertaine) désigne dans le langage des camps de concentration un jeune homme destiné à satisfaire des besoins sexuels, voir Elie Wiesel, La Nuit, Paris, Minuit, 2007, p. 99 ; Primo Levi, Si c’est un homme, Paris, Julliard, 1987 ; Eugen Kogon, Der SS-Staat. Das System der deutschen Konzentrationslager, Munich, Karl Alber, 1946, p. 213-214 : « Kinder und Jugendliche in den KL »..
[37] Procès verbal d’interrogatoire du 18 janvier 1944, Archives du musée d’Auschwitz, cote D-AU I-II-III-2/3, Nr. Inw. 106629, édité par Jörg Hutter, « Konzentrationslager Auschwitz : Die Häftlinge mit dem rosa Winkel », dans O. Mußmann (dir.), Homosexuelle in Konzentrationslagern, op. cit., p. 115-25.
[38] Ibid., p. 118-119.
[39] Hermann Langbein, Menschen in Auschwitz, op. cit., p. 454 ; Eugen Kogon, Der SS-Staat, op. cit., p. 210 sq.
[40] Heinrich Christian Meier, So war es. Das Leben im KZ Neuengamme, Hambourg, Phönix-Verlag, 1946.
[41] Ibid., p. 48. Traduction par nous.
[42] Ibid., p. 48-49, traduit par nous.
[43] Ibid., p. 50, traduit par nous.
[44] Ibid., p 51 : « La plus grande tentation au camp, c’étaient les jeunes hommes âgés de seize à vingt-et-un ans. Il subsiste en eux, aussi bien dans leur beauté que dans leur masculinité, un quelque chose de naturellement féminin. Or l’homme est contraint de par sa nature à aimer. Et lorsqu’il ne trouve pas l’objet approprié, il se rabat par conséquent subsidiairement sur l’inapproprié. » Traduit par nous.
[45] Ibid. p. 52, traduit par nous.
[46] Dans le langage des camps, un kapo (abréviation de Kameradschaftspolizei) désigne un détenu chargé de commander une équipe de codétenu. Wolfgang Sofsky, L’Organisation de la terreur, Paris, Calmann Lévy, 1995.
[47] Germaine Tillion, Le harem et les cousins, Paris, Seuil, 2015 [1966].
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