À propos des rapports sexuels entre personnes de même sexe en Algérie et en Tunisie (1910)

Dans mon travail sur l’homosexualité dans les pays romans, publié dans le numéro de mars 1909 de Sexual-Probleme, j’ai souligné que, d’une part, les mêmes conditions homosexuelles prévalent en France que dans les autres pays d’Europe centrale et septentrionale, et que, d’autre part, les conditions homosexuelles chez les autres peuples romans diffèrent de façon caractéristique des conditions de ces pays. En même temps, j’ai cherché à établir un certain nombre de ces traits caractéristiques pour l’Italie. Entre-temps, j’ai eu l’occasion de me faire une idée des conditions dans les pays plus au sud, à savoir l’Algérie et la Tunisie, grâce notamment à un homosexuel dont j’ai pu suivre les expériences de près pendant un voyage commun.

Ce séjour dans les pays mentionnés, qui s’est limité à quelques semaines, m’a déjà donné la certitude que, tout comme le sud de l’Europe diffère du reste de l’Europe en ce qui concerne les rapports entre personnes de même sexe, il existe également une différence entre ces conditions dans le sud de l’Europe et celles de l’Afrique du Nord.

I. La question de savoir si l’homosexualité proprement dite, l’inversion, c’est-à-dire le penchant invétéré de l’homme vers l’homme, se produit aussi fréquemment ou plus fréquemment ou moins fréquemment en Algérie et en Tunisie qu’en Europe, cette question je ne peux y répondre, car le temps de mes observations est trop court.
La fréquence plus grande des rapports homosexuels en Afrique du Nord par rapport à l’Europe, que j’ai relevée, n’est pas une preuve de la fréquence du sentiment homosexuel, bien que l’on puisse en tirer une certaine présomption.
Un fonctionnaire de banque homosexuel résidant à Alger depuis des années m’a cependant affirmé que le nombre d’Arabes authentiques : homosexuels et bisexuels était très approximatif, bien supérieur à celui des Français, et que presque tous les Arabes aimaient les rapports homosexuels.
De telles déclarations, même de la part de personnes instruites, doivent cependant être prises avec précaution, car elles ne distinguent généralement pas la pédérastie, pratiquée par pur instinct sensuel comme substitut au coït avec les femmes arabes VODI, de l’instinct sexuel réellement dirigé vers son propre sexe.
Une source tout aussi douteuse est le questionnement des natifs. Tous les autochtones, en particulier les nombreux guides touristiques, généralement assez insistants, parlent volontiers des relations sexuelles et des rapports entre personnes du même sexe, mais la question de savoir s’ils disent la vérité et jusqu’à quel point est une autre question. Il y a notamment le danger des questions suggestives, car beaucoup d’indigènes aiment dire à l’étranger ce qu’il veut entendre, ainsi que le danger de blanchir en présentant leur peuple et leurs coutumes sous le jour le plus favorable possible à leurs yeux. Plusieurs guides m’ont avoué que la pédérastie active est très courante dans leur pays, mais lorsque je leur ai demandé si beaucoup d’indigènes n’aiment que les hommes et pas les femmes, ou préfèrent les hommes aux femmes, ils ont répondu par la négative et ont affirmé qu’il n’y a pas d’hommes qui aiment vraiment les hommes. Tous les hommes, après tout, aimaient les femmes. En réponse à des questions répétées, ils ont cependant admis qu’ils connaissaient certains hommes, mais peu nombreux et méprisés, qui n’aimaient que les jeunes hommes et n’aimaient pas les femmes.
L’un d’entre eux nous a alors également dit qu’il connaissait 3-4 hommes de ce type dans sa région – dans trois villages d’environ 2000 habitants réunis. Il a également rapporté qu’à Biskra, dans la rue Ouled (la rue des prostituées publiques), un indigène qui y vivait avec une prostituée n’aimait que les hommes et lui avait proposé de l’argent pour avoir des rapports sexuels. Il a cependant refusé l’offre, car il avait assez d’argent pour aller voir une prostituée.
Dans un café de cette rue Ouled, j’ai moi-même eu l’occasion de voir une personne habillée en femme, prise pour telle par tous les étrangers, qui faisait office de serveuse et de danseuse. Mon guide autochtone m’a informé que cette personne était un homme vivant entièrement comme une femme, qui ne touchait jamais un Franc.

L’homme d’une trentaine d’années, très laid, a également fait forte impression sur une femme un peu déjà âgée. A mon regard curieux, il est venu immédiatement à notre table avec le comportement insistant de la serveuse d’un bar. Cette personne était sans aucun doute un homosexuel qui se livre à la pédérastie passive auprès des Arabes – probablement en partie par inclination et par convoitise, en partie pour obtenir un petit pécule.
Un jeune homme très féminin a également attiré mon attention à Constantine. Alors que je me promenais dans le quartier arabe le soir, et que je passais dans la rue des prostituées publiques, une créature féminine – un jeune homme de vingt ans – se tenait à la porte d’une des maisons publiques et me suivait de manière ostensible. Il s’est également adressé à moi dans son français approximatif. Il y avait quelque chose d’authentiquement féminin dans son mouvement, sa démarche, son déhanchement, son discours. Mon guide m’a alors également décrit le jeune homme comme une prostituée exclusivement féminine qui ne fréquentait que des hommes, et a fait remarquer qu’il y avait encore plusieurs hommes de ce genre dans le quartier arabe.

II. Si je ne peux rien affirmer de précis sur la fréquence des sensations sexuelles contraires en dehors des observations ci-dessus, je peux néanmoins affirmer la grande prévalence des rapports homosexuels.

  1. Cette diffusion, comme en Italie, n’a pas donné lieu à une quelconque organisation et concentration dans le but de se faire connaître auprès des homosexuels.
    Même dans les grandes villes d’Alger et de Tunis, il n’y a pas de cafés ou de bains homosexuels où l’on pourrait trouver régulièrement un certain nombre d’uranistes faisant connaissance les uns avec les autres.
    En effet, les nombreux bains mauresques offrent la possibilité d’avoir des relations homosexuelles, mais le plus souvent uniquement avec les préposés aux bains, qui ne sont toutefois disposés à le faire que sous une certaine forme, dont nous parlerons plus loin.
    Ces préposés aux bains, qui sont enclins à de tels actes, ne se trouvent pas seulement dans certains bains individuels, mais sont présents dans presque tous les bains maures.
    Il n’est pas nécessaire que les homosexuels se concentrent sur certains bains ou auberges, car il y a partout des autochtones qui sont enclins aux relations homosexuelles.
  2. La grande propension et la fréquence des rapports sexuels entre personnes du même sexe sont déjà évidentes dans le comportement des nombreux jeunes guides autochtones. Il suffit de la moindre allusion, d’un mot, d’un signe, pour qu’ils fassent connaître et expriment directement leur disposition à s’engager dans des rapports homosexuels pour une somme modique (quelques francs, de 1 à 5), certains même parfois d’un seul coup publiquement d’une manière aussi radicale, Si la nouvelle se répand qu’un étranger homosexuel séjourne dans le lieu, il se peut que non seulement divers guides demandent à le guider, mais aussi qu’un certain nombre d’autochtones l’observent et le poursuivent de leurs propositions sexuelles. Ainsi, dans une station de montagne d’Algérie, pourtant très fréquentée par les étrangers, le monsieur homosexuel susmentionné, en ma compagnie, avait ouvertement admiré la beauté d’une jeune Arabe – splendide en effet – dans le café maure du village.
    Immédiatement, un homme âgé présent a accepté de l’emmener dans un jardin pour avoir des rapports sexuels avec le jeune, plus tard, lorsque nous avons quitté le “café”, nous avons été rattrapés par trois Arabes, deux plus jeunes et un plus âgé, tous trois voulant avoir des rapports sexuels, Apparemment, la rumeur de l’homosexualité de mon compagnon s’était répandue dans l’hôtel où nous avions mangé, par l’intermédiaire d’un visiteur du café, car un guide et un domestique de l’hôtel sont venus à notre rencontre et ont annoncé leur intention de se rendre disponibles à des fins sexuelles.

Le lendemain, un des habitants de la ville de montagne nous a suivis à Biskra, où nous étions partis, et nous attendait devant l’hôtel. Ce n’est que lorsque nous lui avons dit de manière assez bourrue que nous n’avions nullement besoin de ses conseils et de ses services, et qu’il perdait complètement son temps avec nous, qu’il nous a quittés.
Lorsque, à Biskra également, le monsieur homosexuel avait révélé son penchant à un guide, un autre guide et deux compagnons nous ont rencontrés le soir devant l’hôtel et nous ont accompagnés sur une certaine distance, révélant immédiatement leurs intentions de rapports sexuels. L’un d’eux, en montrant ses vêtements brodés, a signifié à ups qu’il était un indigène plus aisé, et apparemment il ne s’est pas offert pour l’argent ; il était probablement un contre-sexuel. Il a cherché à nous déterminer à entrer dans ses obédiences en décrivant les risques sanitaires des rapports avec les prostituées. Ce n’est que lorsque mon compagnon homosexuel l’a expressément assuré, ainsi que ses amis, qu’il abhorrait le type de relations sexuelles qu’ils désiraient, la pédérastie active qu’ils souhaitaient, et qu’il ne s’y abaisserait jamais, qu’ils nous ont quittés.

Il faut noter, d’ailleurs, que tous les Arabes, aussi insistants soient-ils, ne cherchent nullement à faire du chantage et ne se laissent pas entraîner à une quelconque insulte ou grossièreté à l’égard de l’étranger. Ils espèrent seulement que l’étranger se laissera utiliser sexuellement et qu’ils pourront gagner un peu d’argent par la même occasion. Que leur espoir se réalise ou non, ils restent tout aussi décents et polis.

  1. Une attention particulière doit être accordée au type particulier de rapports homosexuels préférés par les Arabes et à l’évaluation différente de l’activité active et passive. Si en Italie, cette évaluation est déjà différente et l’inclination à la pédérastie active plus grande que pour les autres actes homosexuels, comme je l’ai expliqué plus en détail dans mon essai précité dans la rubrique “Problèmes sexuels”, ces aspects sont beaucoup plus mis en évidence en Afrique du Nord.

Beaucoup d’indigènes, qui s’offrent à des rapports homosexuels ou sont prêts à le faire, n’ont pourtant que la pédérastie active dans l’œil, on ne le leur permet pas et ils ne sont donc pas prêts à d’autres actions sexuelles, même pour les plus inoffensives, pas même un baiser sur les lèvres, que beaucoup d’Arabes refusent absolument.
De même, comme me l’ont assuré divers visiteurs homosexuels des établissements de bains, beaucoup de baigneurs sont avides de pédérastie active de leur part, mais ne tolèrent même pas que leurs parties sexuelles soient touchées par la main de leur partenaire,

Compte tenu de cette préférence marquée des indigènes pour la pédérastie active, on peut toutefois se demander quels sont les objets passifs, si presque tous veulent être actifs. A cela, il faut répondre que, bien sûr, une partie d’entre eux se livre à des actes passifs, et que, très probablement, des individus encore très jeunes, faibles et impressionnables doivent être dociles aux actifs ; aussi, bien sûr, quelques vrais homosexuels efféminés, qui ont une préférence pour la pédérastie passive, seront à la disposition de la grande masse des actifs.

La grande prévalence de la pédérastie active, avec une aversion générale pour les actes passifs, me semble un signe qu’il y a juste beaucoup d’hétérosexuels parmi les amateurs de cette forme active de rapports homosexuels, qui désirent l’acte sensuel brut comme substitut aux rapports avec la femme. Néanmoins, même ce point de vue n’explique pas entièrement la préférence répandue pour la pédérastie active, car en Europe du Nord et en Europe centrale, les hétérosexuels qui se livrent à des rapports homosexuels pour des considérations financières, par complaisance ou pour d’autres raisons, bien qu’ils soient beaucoup moins nombreux que les Arabes qui sont prêts à s’engager dans des rapports homosexuels, se livrent néanmoins presque invariablement au moins aux formes passives les plus légères de rapports homosexuels (onanisme mutuel, coitus inter femora, etc.). En revanche, la grande majorité de ces hétérosexuels abhorrent la pédérastie passive et aussi active, tandis que le nombre d’Arabes qui aiment ou autorisent volontiers des actes autres que la pédérastie active semble être plus faible par rapport à ces hétérosexuels européens.

On peut peut-être dire qu’en Europe du Nord et en Europe centrale, l’élément sentimental doux et passif est plus présent dans le type moyen, ce qui le rend plus apte à la passivité dans les relations sexuelles, aux actes tendres, aux baisers et aux étreintes, et que l’on trouve donc un élément féminin dans le type nord-européen, malgré l’aversion générale de la grande masse de la population pour les actes homosexuels, tandis qu’à l’inverse, le type sud, même s’il peut y avoir quelque chose de féminin dans sa démarche, ses manières, etc. Le type méridional, en revanche, même s’il peut contenir de la féminité dans sa démarche, son comportement, etc., est fondamentalement plus fougueux, plus capricieux et plus actif, et répugne aux rôles passifs et à l’étreinte tendre en général.
Là-bas, le plus câlin, cédant passivement, même si c’est plutôt ou avec moins de plaisir sensuel, ici le plus brutalement avide, désirant activement la luxure sensuelle.
Par ailleurs, il ne faut pas non plus négliger le moment psychologique que j’ai souligné dans les “Problèmes sexuels”, à savoir que la dévotion passive est considérée comme honteuse, parce qu’à travers elle le rôle féminin est assumé et qu’il en résulte une féminisation complète, une soumission, une humiliation, tandis que l’actif, le dominant, l’accablant, reste l’homme.

III. Quelles sont les causes de la généralisation des rapports sexuels entre personnes de même sexe ?

En premier lieu, ici aussi, et dans une mesure encore plus grande qu’en Italie, toute l’atmosphère spirituelle dans laquelle le domaine de la sexualité est si fondamentalement différent de celui de l’Europe du Nord et du Centre est, je dirais, un facteur. L’Arabe regarde la vie sexuelle avec un œil complètement naïf, encore ouvert sur la nature ; les réflexions sur les questions sexuelles et même l’idée du péché pour des actions qui ne font de mal à personne et augmentent la joie et le plaisir de la vie lui sont étrangères. Ces vues sont protégées et encouragées par une religion et une morale opposées aux sens et au christianisme, hostiles à la vie, et qui permettent de goûter aux biens et aux plaisirs de la vie comme on l’entend, sans arrière-pensées et sans scrupules, si l’on ne nuit pas à son prochain.
La loi, la morale, la religion, dont les deux premières se fondent dans la troisième institution qu’est la religion chez les musulmans, ne contiennent aucune interdiction explicite ni même menace de sanction à l’encontre des rapports homosexuels en soi. La seule chose que le Coran dit à propos des rapports entre hommes est le récit des habitants de Sodome désirant les étrangers descendus à Loth pour un usage sexuel. Ce récit est répété à pas moins de cinq endroits. Deux passages portent uniquement sur la violation du droit d’hospitalité et l’insulte des hôtes ; dans les trois autres passages, en revanche, il est question d'”actes honteux” et d'”hommes licencieux” qui “désirent venir chez des hommes ivres de luxure en plus des femmes”.

Mais on ne trouve nulle part une interdiction réelle et explicite, et dans la quatrième sourate, qui aborde le domaine du sexuel et explique notamment quelles femmes libérer est un péché, il est dit : “Tout ce qui n’est pas interdit ici est permis”.

Selon les informations d’un médecin européen, ami d’un musulman instruit, la déclaration de Mahomet aurait été conservée par transmission orale des écritures, selon laquelle celui qui était trop pauvre pour pouvoir garder les quatre épouses autorisées par le Coran, était autorisé à avoir un garçon à la place de la troisième ou de la quatrième épouse. Ainsi, une reconnaissance explicite des rapports entre personnes de même sexe serait établie, en quelque sorte, dans sa conception comme substitut des rapports avec la femme. Il va de soi qu’il faut en déduire l’approbation et l’autorisation complètes des rapports homosexuels de la part d’un pur contra-sexuel ou d’un bisexuel.

La banalité avec laquelle les rapports homosexuels sont considérés frappe dès les conversations avec les guides, qui discutent de la question avec une franchise étonnante pour des Européens.
Même les Arabes qui ont eu des rapports sexuels avec un étranger ou qui ont refusé la proposition d’un étranger (par exemple parce qu’ils voulaient seulement pratiquer une pédérastie active non désirée) ne croient pas avoir acquis par là un droit plus grand à la familiarité ou même une sorte de complicité de péché ou de crime ; ils restent toujours aussi amicaux, sensibles et gentils.
L’Arabe voit dans les rapports entre personnes du même sexe quelque chose de si trivial, de si insignifiant, un plaisir mutuel de donner et de recevoir, qu’il ne prétend à aucun rapprochement personnel, spirituel ou social tant que des relations permanentes et plus profondes ne se sont pas développées entre les deux parties.
Une autre preuve de la considération évidente des rapports homosexuels se trouve, me semble-t-il, dans le fait que les relations sexuelles de l’indigène avec un étranger – surtout si la pédérastie passive n’est pas tolérée par l’Arabe – ne sont pas considérées comme honteuses, ni interdites, alors que les femmes musulmanes ne peuvent pas permettre à un non-croyant d’avoir des rapports sexuels, et que même les prostituées publiques hésitent à recevoir un Européen. Dans la ville de Tunis, il est même interdit d’entrer chez les prostituées publiques (mais pas dans les autres villes de Tunisie).
Je me souviens encore très bien du grand cri d’horreur que poussa un étrille lorsque, dans la ville de Tunis, un Français ignorant des circonstances, qui se promenait dans la rue de arabe, voulut franchir le seuil de la maison publique où l’étrille était assise, et je vois encore très bien comment plusieurs Arabes, debout devant la maison, tirèrent rudement le Français.

Il n’en va pas de même pour les prostitués masculins qui parlent ouvertement à l’inconnu dans la rue et l’accompagnent sans complexe dans un hôtel.
Par conséquent, on attache moins d’importance aux rapports entre personnes du même sexe qu’aux rapports de l’étranger avec la femme indigène, ou même avec la prostituée arabe.
À titre d’exemple de la façon arabe de considérer les choses sexuelles, qui peut être considérée comme un mauvais cynisme en termes européens, je peux citer l’expérience suivante :
J’étais allé plusieurs fois à un bain maure d’Alger avec le monsieur homosexuel déjà cité ; pendant que j’étais dans la salle de bain, un jeune préposé au bain, vêtu des habits dans lesquels le monsieur était resté, s’était approché de lui sans autre forme de procès et tout à coup, comme me l’a dit le locataire, l’avait embrassé presque contre son gré et avait pratiqué avec lui des coits inter femora. Plus tard, alors que je me déshabillais seul dans la cellule, trois Arabes se sont soudain présentés à la porte. J’ai d’abord pensé que les trois individus étaient menaçants, mais lorsque j’ai demandé ce qu’ils voulaient, le plus âgé des trois m’a répondu qu’il était le père du jeune serviteur et qu’il voulait lui aussi effectuer une “poussée”. C’est avec difficulté que j’ai réussi à lui faire comprendre que je ne voulais pas cela et que je ne le permettrais pas.
Malgré cette évidence générale, il y a bien sûr aussi des Arabes qui – du moins pas avec des étrangers – ne s’engagent pas dans des rapports homosexuels sous quelque forme que ce soit. Certains parlent même de ces rapports avec mépris, mais l’étranger a souvent du mal à distinguer si ce mépris n’est pas une simple hypocrisie affichée à son égard, ou de la langue de bois. C’est ainsi qu’on m’a expliqué, ainsi qu’à quelqu’un de ma compagnie.
Monsieur hétérosexuel un chef âgé, à qui, cependant, je n’ai pas fait connaître mon intérêt pour la question homosexuelle, il comprend les amours avec la femme et aime beaucoup le “coït”, mais ne comprend pas et abolit le vice de la pédérastie.
Mais cet Arabe n’aurait-il pas parlé différemment s’il avait eu devant lui un étranger qui se serait offert à lui pour une pédérastie passive ?
En ce qui concerne la propension de l’Arabe aux rapports homosexuels, il convient de faire une distinction non seulement entre les actes actifs et passifs, mais aussi entre les Arabes mariés et non mariés.
Il ne fait aucun doute que certains Arabes mariés (peut-être même beaucoup) pratiquent également la pédérastie, mais les dirigeants locaux m’ont dit à plusieurs reprises que les Arabes mariés ou les Arabes qui ont une relation permanente avec une femme ne se livrent plus à des actes homosexuels. Par exemple, un dirigeant de 26 ans m’a dit ouvertement qu’il avait l’habitude d’avoir des relations sexuelles avec des hommes, mais que depuis des mois il a une relation permanente avec une prostituée et n’a plus de relations sexuelles avec des hommes.

2) L’une des causes de la propagation des actes homosexuels me semble toutefois résider dans le statut de célibataire de nombreux Arabes et dans la difficulté de trouver des femmes et des jeunes filles pour les rapports sexuels, en dehors des prostituées publiques disponibles uniquement dans les grandes villes. En effet, bien plus qu’en Europe, l’Arabe n’a pas les nombreuses occasions d’avoir des relations intimes avec la gent féminine, puisque les femmes et les jeunes filles vivent complètement recluses dans la maison, ne sortent que voilées, et n’ont pas l’occasion de voir d’autres hommes que leurs proches parents.

3) Comme cause des rapports homosexuels en Algérie et à Tunis, plusieurs autres facteurs entrent bien sûr en ligne de compte : tout d’abord, le désir de gagner de l’argent, mais ce facteur ne peut à lui seul expliquer pourquoi les Arabes sont particulièrement friands de pédérastie et pourquoi ils sont beaucoup plus nombreux que les Européens à aimer les rapports homosexuels.
Alors, bien sûr, le tempérament bouillant et la chaleur qui stimule les sens jouent un rôle, mais seulement en relation avec les moments développés ci-dessus et surtout en relation avec la conception évidente et la manière amorale d’envisager l’ensemble de la sexualité en général.

Trad. Fr. de Numa Praetorius, « Über gleichgeschlechtlichen Verkehr in Algerien und Tunis », Anthropophyteia, Vol. 7, 1910, pp. 179-188, établie par Régis Schlagdenhauffen, 2021.

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