Cet article questionne la fabrique de la décision pénale en temps de guerre et en situation d’annexion. Il s’appuie sur les jugements pour homosexualité rendus par le tribunal de Strasbourg entre 1942 et 1945. Les données statistiques recueillies permettent d’établir que les Alsaciens jugés durant cette période sont majoritairement jeunes et appartiennent aux classes populaires. Ils sont condamnés pour la plupart à de lourdes peines de prison pouvant aller jusqu’à la perpétuité et cela « dans l’intérêt de la préservation du peuple ». Effet arbitraire de l’« annexion sexuelle », certains sont poursuivis pour des faits antérieurs à l’introduction du droit pénal allemand en Alsace, d’autres immédiatement internés en camp au lendemain de leur libération. Mais plus que simplement des actes, ce sont des identités déviantes qui sont jugées. D’une part au moyen d’une comptabilité des orgasmes qui serait but et preuve d’une activité sexuelle « anormale » ; d’autre part en établissant une hiérarchie des masculinités déviantes qui tend à faire exister le criminel avant le crime. Télécharger ici l’article complet en pdf >> Clio-39-§175-17dec
*** Paru dans Clio, n°39, 2014